Trouver l’équilibre entre autorégulation, protection du public et empathie

Partagersur un des médias sociaux suivants :

Dans un contexte de soins de santé en constante évolution, l’importance de l’autorégulation des professionnels ne peut être surestimée. À l’Ordre des dentistes du Québec, nous reconnaissons que la grande majorité des dentistes sont compétents, éthiques et profondément engagés à offrir des soins sécuritaires, dans le meilleur intérêt de leurs patients. L’Ordre n’est pas présent dans les salles de traitement. Pourtant, l’autorégulation s’exerce chaque jour, dans chaque cabinet, par des professionnels responsables et consciencieux.

La protection du public ne repose pas uniquement sur l’encadrement, la règlementation ou la discipline. Elle découle d’un effort collectif fondé sur la confiance, la prévention, l’accompagnement, le professionnalisme et l’intégrité. Comme ordre, notre rôle est de définir clairement nos attentes envers les professionnels. Nos interventions doivent demeurer proportionnelles au réel risque de préjudice, et la surrèglementation doit être évitée. Il revient ensuite aux dentistes de veiller à pratiquer dans les limites de leur compétence, conformément à ces attentes, tout en maintenant leur autonomie professionnelle, et ce, toujours, au service du patient.

C’est cette philosophie qui a guidé notre adoption des principes de la règlementation proportionnée (Right-Touch Regulation) dans le cadre de l’élargissement du champ de pratique lié aux agents injectables à visée esthétique. Ce cadre règlementaire, conçu à la suite de consultations avec plusieurs experts et parties prenantes — dont le Collège des médecins et d’autres régulateurs canadiens— repose sur une approche graduée visant à soutenir une prestation sécuritaire et responsable des soins esthétiques et thérapeutiques, tout en évitant d’être trop prescriptive.

Grâce à des lignes directrices claires et des exigences rigoureuses en matière de formation, nous sommes convaincus que les dentistes chercheront à se former de manière complète et conforme avant de poser ces actes. Cette approche équilibrée tient compte du fait qu’au quotidien, les dentistes accomplissent des gestes cliniquement sophistiqués, qui exigent les mêmes qualités d’autorégulation, de rigueur et de professionnalisme.

Alors que je franchis le cap des 500 jours à la présidence (543 pour être exact), je ressens une immense fierté pour ce que nous avons accompli — ensemble, avec les membres du Conseil d’administration et les équipes de l’Ordre. Nous avons franchi des étapes importantes pour moderniser notre approche règlementaire. Ces progrès sont le fruit d’une collaboration sincère et d’un engagement partagé. Mais le travail est loin d’être terminé, et nous demeurons à l’écoute.

Comme toute organisation responsable, nous avons le devoir de remettre en question nos pratiques, nos interactions et même certains aspects de notre mission. C’est ce que nous faisons actuellement dans le cadre de notre nouvelle planification stratégique — un exercice rigoureux et tourné vers l’avenir.

L’un des chantiers clés de cette réflexion concernera la santé mentale de nos membres. Nous aspirons à une approche humaine, équilibrée et empathique, qui tient compte des défis auxquels les dentistes font face, sans jamais perdre de vue notre devoir fondamental de protection du public.

L’empathie est, à mon égard, une des qualités les plus importantes pour tout professionnel de la santé. Et pourtant, dans notre monde moderne, une forme de fatigue empathique s’installe. Le rythme effréné, les exigences accrues, la charge émotionnelle des soins peuvent mener à un détachement progressif. Il faut résister à cette tendance. Il faut se rappeler ce qui est au cœur de notre vocation : soigner, comprendre, agir avec compassion.

Au-delà de nos obligations professionnelles, nous avons la responsabilité de défendre les valeurs humaines qui fondent notre rôle de soignants, malgré les pressions externes.

À l’ODQ, mon souhait est de promouvoir un équilibre durable : entre la protection du public et la confiance envers les professionnels ; entre la responsabilisation et l’empathie. En incarnant ces principes, je suis convaincue que nous pouvons maintenir des standards de soins élevés, dans le respect du professionnalisme — et de l’humanité — de celles et ceux qui les prodiguent.

Liliane Malczewski, présidente